mardi 14 mars 2017

KIDS

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

de Larry Clark. 1995. U.S.A. 1h31. Avec Leo Fitzpatrick, Sarah Henderson, Justin Pierce, Chloë Sevigny, Rosario Dawson, Harold Hunter, Harmony Korine, Yakira Peguero.

Sortie salles France: 28 Juillet 1995 

FILMOGRAPHIELarry Clark (né le 19 janvier 1943 à Tulsa dans l'Oklahoma) est un photographe, réalisateur et directeur de la photographie américain. 1995 : Kids. 1998 : Another Day in Paradise. 2001 : Bully. 2002 : Teenage Caveman (TV). 2002 : Ken Park. 2004 : Wassup Rockers
2006 : Destricted - segment Impaled. 2012 : Marfa Girl. 2015 : The Smell of Us.


Cri d'alarme contre le fléau du Sida qu'une jeunesse déboussolée contracte en toute inconscience, Kids fait l'effet d'un électro-choc dans sa radicalité à imprimer sur pellicule un docu-fiction criant de vérité autour du mal-être existentiel. Afin de se préserver des maladies vénériennes, le jeune Telly cumule les conquêtes sexuelles de très jeune âge. Mais une de ses récentes amies, Jenny, apprend par une praticienne qu'elle est séropositive. Désespérée, elle tente d'avertir son ancien amant alors que ce dernier s'adonne librement à la débauche parmi ses camarades adeptes de drogues et d'alcool. Pour son premier essai derrière la caméra, Larry Clark impose le respect par son brio à filmer sans concession les pérégrinations urbaines de jeunes banlieusards livrés à une déchéance à la fois physique et morale.


Agrémenté de dialogues TRES crus dictés par des comédiens amateurs (ou néophytes) au charisme naturel (Rosario Dawson, étonnante de spontanéité en allumeuse impudente, Chloë Sevigny, bouleversante de désarroi auprès de sa pathologie vénérienne, Leo Fitzpatrick, plus vrai que nature en érotomane aux tendances pédos quand bien même Justin Pierce lui partage la vedette avec une identité aussi perverse !), Kids nous fait pénétrer dans leur intime quotidienneté avec un malaise viscéral prégnant. Le spectateur étant contraint d'observer malgré lui leur inlassable conversation égrillarde entre 2/3 défonces de joints et parties de jambe en l'air. Quand bien même la 1ère victime du Sida accablée d'impuissance et de chagrin tentera en dernier ressort de retrouver son amant de passage afin de lui faire assumer sa lourde responsabilité. Si Kids foudroie autant émotionnellement parlant et nous laisse en état de choc sitôt le générique écoulé, c'est notamment grâce au parti-pris de son auteur à dépeindre de la façon la plus glauque et épidermique qui soit les agissements libidineux de ces ados sans vergogne (ils ne respectent jamais la gente féminine et se complaisent dans une raillerie putassière) tributaires de l'ivresse de la baise, de la défonce et des beuveries. Mais derrière les actions triviales de ses jeunes branleurs issus de quartiers défavorisés, on ne peut toutefois s'empêcher d'éprouver une profonde tristesse et empathie quant à leur condition pubère victime de démission parentale. Incultes et désireux de brûler leur vie au jour le jour sans se soucier des conséquences du lendemain, ces Kids issus de la génération 90 insuffle une vive émotion dans leur condition fragile juvénile, dans leur exubérance ignorante à s'adonner aux dérives avec un épanouissement suicidaire.


Glauque, malsain, sordide, dérangeant et psychologiquement éprouvant, Kids nous saisit à la gorge dans sa peinture nihiliste de brosser les portraits peu recommandables de jeunes délinquants incapables de se responsabiliser face au fléau du Sida (l'un d'entre eux évoquera d'ailleurs qu'il s'agit d'une rumeur infondée). Car autour de leurs excès toxicomanes et délinquants (passage à tabac communautaire sur un jeune quidam, maraude dans une épicerie), c'est avant tout un cri d'alarme contre la contagion de la maladie que Larry Clarke dénonce avec une lucidité documentée parfois à la limite du soutenable. De ce coup de maître d'une intensité dramatique sans retenue émane un témoignage inoubliable aussi essentiel qu'accablant si bien que la réalité eut rejoint la fiction lorsque Justin Pierce (Casper) se suicida par pendaison en 2000 et qu'Harold Hunter (Harold) mourut d'un arrêt cardiaque en 2006 après avoir inhalé de la Coke. 

A Justin et Harold...

P.S: A privilégier impérativement la VOST !

Bruno Dussart.
4èX



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