de Ridley Scott. 1982. U.S.A. 1h57. Avec Harrison Ford, Rutger Hauer, Sean Young, Edward James Olmos, M. Emmet Walsh, Daryl Hannah, William Sanderson, Brion James, Joe Turkel, Joanna Cassidy.
Sortie Salles France: 15 Septembre 1982. U.S: 25 Juin 1982
FILMOGRAPHIE: Ridley Scott est un réalisateur et producteur britannique né le 30 Novembre 1937 à South Shields. 1977: Duellistes. 1979: Alien. 1982: Blade Runner. 1985: Legend. 1987: Traquée. 1989: Black Rain. 1991: Thelma et Louise. 1992: 1492: Christophe Colomb. 1995: Lame de fond. 1997: A Armes Egales. 2000: Gladiator. 2001: Hannibal. 2002: La Chute du faucon noir. 2003: Les Associés. 2005: Kingdom of heaven. 2006: Une Grande Année. 2007: American Gangster. 2008: Mensonges d'Etat. 2010: Robin des Bois. 2012: Prometheus.
Le pitch : novembre 2019, Los Angeles. Quatre réplicants, androïdes conçus pour être esclaves ouvriers, s’échappent de leur colonie spatiale et reviennent sur Terre pour retrouver leur créateur. Rick Deckard, blade runner renommé, est enrôlé pour les traquer et les "retirer".
Dès les premières images, flamboyantes et crépusculaires, le dépaysement est total. Un univers futuriste expressif s’illustre avec une esthétique d’un réalisme ténébreux fulgurant. À travers la plénitude incandescente d’une cité high-tech, Blade Runner s’ouvre à nous tel l’orifice d’un œil azur transpercé d’un brasier industriel. Ce macrocosme démesuré, aussi opaque que polychrome, saturé de néons et d’affiches publicitaires, hypnotise d’autant plus qu’il s’affilie à l’univers vétuste du polar noir des années 50..
Par son architecture gothique, son design technologique, le style rétro des vêtements fagotés par les flics, Ridley Scott mêle la modernité futuriste d’un monde en marasme à la mélancolie d’une époque révolue. Le design, en demi-teinte, oscille entre les jeux de lumière high-tech et l’obscurité tamisée des foyers, instaurant une ambiance à la fois cafardeuse et sépulcrale. À l’extérieur, sous une pluie battante ou dans la tiédeur d’une nuit infinie, chaque citadin déambule tel un automate impassible. L’incroyable richesse de ces décors fantasmatiques, fignolant chaque détail architectural, nous plonge dans un univers oppressant jusqu’au vertige : une œuvre hybride d’une beauté plastique hallucinée.
Dans cette société aphone, en surpopulation, où l’on incite les humains à l’exil interplanétaire, un flic indécis traque quatre réplicants toujours plus conscients de leur condition soumise et de leur trépas imminent. Même dans les résidences feutrées, certains s’affublent de robots domestiques pour compenser l’ennui d’une existence vidée d’émotions. Camouflés dans la foule, les réplicants — androïdes plus vrais que nature — sont condamnés à vivre un court laps de temps, esclaves d’un monde totalitaire en perte de repères. Soudainement épris de désespoir face à leur précarité, les quatre fugitifs se rebellent pour retrouver leur créateur, espérant prolonger leur vie.
Dans ce climat désenchanté et suffocant, scandé par le score élégiaque de Vangelis, Ridley Scott peint un futur hermétique où le sentiment prégnant de solitude suinte des regards atones d’une populace déshumanisée. À travers le regard d’un flic équivoque, prêt à neutraliser ces êtres nantis d’émotions, son cheminement le conduit peu à peu à l’empathie — d’abord pour une droïde vertueuse, puis pour un réplicant anarchiste.
Cette traque meurtrière, jalonnée de plages de lyrisme funeste — la mort illégitime de Zhora, incarnée par l’éminente Joanna Cassidy dans une posture insidieuse, ou celle, symbolique, de Roy, campé par un Rutger Hauer magnétique en ange déchu — interroge la dichotomie du Bien et du Mal, et notre nostalgie existentielle, à faible lueur d’espoir. Elle exhume notre amertume face à l’atavisme de la mort et la paranoïa de l’Autre, qui nous pousse à ériger des murs contre une hostilité fantasmée.
Œuvre visionnaire en quête de rédemption, Blade Runner illustre — sans ostentation — un monde moribond où chaque être se déshumanise dans la routine, au profit d’une société robotisée. Et pourtant, ces androïdes avides de dignité finissent par nous refléter : capables d’émotions, d’attachements, de révolte. Ridley Scott interroge alors, de manière métaphorique, le sens de l’existence et notre condition humaine — si fébrile, si dépressive — à l’ombre d’un créateur alchimiste ou divin, lui-même faillible.
Un chef-d’œuvre visionnaire d’une grande fragilité humaine.
Une œuvre picturale, d’une fulgurance détaillée.
Un panthéon de la SF métaphysique, d’une inépuisable fascination opaque.
Belle analyse d un chef d œuvre de la SF cyber punk
RépondreSupprimerMerci à vous (également d'avoir pris la peine de me lire) ^^
RépondreSupprimer