mardi 12 décembre 2017

INCUBUS

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

de Leslie Stevens. 1966. U.S.A. 1h15. Avec William Shatner, Milos Milos, Allyson Ames, Ann Atmar, Eloise Hardt, Robert Fortier

Sortie salles France: Novembre 1966. U.S: 26 Octobre 1966

FILMOGRAPHIE: Leslie Clark Stevens IV (Leslie Stevens) est un scénariste, dramaturge et producteur de télévision américaine né le 3 Février 1924, décédé le 24 Avril 1998. 1960 : Propriété privée. 1962 : Hero's island. 1965 : Incubus. 1987 : Three kinds of heat.


Exhumé de l'oubli en 1998 grâce à la Cinémathèque Française, Incubus est l'archétype par excellence du film maudit qui plus est tourné en espéranto (une langue internationale peu utilisée au cinéma). Une sortie salles extrêmement discrète (11 430 entrées sur notre territoire), un incendie dévastateur causant la perte de la bande originale en dépit d'une seule copie que notre cinémathèque pu sauver, la société Davstar qui tomba en faillite et trois comédiens retrouvés morts après le tournage ! Milos Milos s'étant suicidé après avoir tué sa compagne, Ann Atmar en fit de même pour sa personne, et la fille de l'actrice Eloise Hardt fut retrouvée également assassinée après avoir été kidnappée ! Sorti en Dvd en 2001 sous l'égide du distributeur Jean-Pierre Dionnet qualifiant l'essai comme un chef-d'oeuvre (voir son digne monologue dans les Bonus), Incubus renaît enfin de ces cendres avec une intensité électrisante. Véritable cauchemar éveillé truffé de séquences mystiques d'un onirisme aussi bien baroque que macabre, l'intrigue nous relate la romance improvisée entre une succube pratiquant des sacrifices humains pour le prince des ténèbres, et un jeune soldat voué à la cause de Dieu que sa soeur avait recueilli après la guerre.


Autour de ce duo sentimental, les forces du Bien et du Mal vont se combattre jusqu'à ce que l'un emporte la mise. Tourné dans un magnifique noir et blanc rappelant par moments les plus belles fresques du Masque du Démon de Bava, Incubus est une pure invitation au rêve sous l'alchimie du Mal. Comme si Satan en personne était descendu sur terre pour s'approprier une caméra et filmer ses méfaits mortifères afin de nous les faire partager. C'est dire la puissance de son atmosphère horrifique que Leslie Stevens transfigure entre sens du cadrage alambiqué et stylisme sépulcral. On s'étonne également du jeu expressif des acteurs méconnus littéralement hantés, possédés par la cause de Satan, quand bien même le néophyte William Shatner parvient à nous faire omettre son illustre rôle de Capitaine Kirk dans celui d'un soldat dévoué, partagé entre la passion des sentiments et la raison de Dieu qu'il se résigne finalement à sauvegarder en dernier ressort. Si l'intrigue étique et sans surprise (en dépit d'une sublime résurrection assez latine je trouve) avait gagnée à être plus dense et étoffée, sa fulgurance formelle tout droit sortie d'un authentique cauchemar (qu'on aurait donc gravé sur pellicule) emporte tout sur son passage. D'autant plus que le jeu bougrement inquiétant des seconds-rôles nous magnétise par leur capacité à nous faire croire (sans effet de manche) à leur foi surnaturelle (vision dérangeante oh combien crépusculaire d'un bouc à l'appui).


Véritable ovni infortuné condamné à la solitude, à l'isolement et à la damnation si je me réfère aux circonstances tragiques des suites du tournage, Incubus demeure une perle rare dans son désir de rationaliser une expérience sataniste imprégnée de mystère diffus et de visions cauchemardesques (notamment l'exhumation d'un incube) que l'on croirait extirpées de l'Enfer. A découvrir d'urgence pour les vrais initiés d'ambiance funèbre, cas de figure autonome et (si) inspiré de la divinité du Mal constamment aux aguets à épier nos failles et faiblesses. 

 @ Bruno
11.01.24. 3èx

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