vendredi 13 novembre 2015

ERASERHEAD / LABYRINTH MAN

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site mindpirates.org

de David Lynch. 1971-1976. U.S.A. 1h29. Avec Jack Nance, Charlotte Stewart, Allen Joseph,
Jeanne Bates, Judith Anna Roberts.

Sortie salles France: 17 décembre 1980. U.S: 28 septembre 1977.

FILMOGRAPHIE: David Lynch est un réalisateur, photographe, musicien et peintre américain, né le 20 Janvier 1946 à Missoula, dans le Montana, U.S.A.
1976: Eraserhead. 1980: Elephant Man. 1984: Dune. 1986: Blue Velvet. 1990: Sailor et Lula. 1992: Twin Peaks. 1997: Lost Highway. 1999: Une Histoire Vraie. 2001: Mulholland Drive. 2006: Inland Empire. 2012: Meditation, Creativity, Peace (documentaire).


Précédé d'un bouche à oreille sulfureux lors des séances des fameux Midgnight Movies, Eraserhead est un premier long-métrage d'une ambition singulière dans la motivation expérimentale du réalisateur à nous confiner dans l'antre de son univers cauchemardesque littéralement anxiogène. Etudiant en arts plastiques, le néophyte David Lynch aura mis plus de 5 ans à façonner cet essai en noir et blanc après l'avoir autoproduit. Ce n'est qu'au fil des ans et des décennies que le film accède à la renommée après avoir essuyé échec public et critique. Dérangeant, malsain, perturbant, mais surtout terriblement anxiogène et dépressif, Eraserhead transpire l'aigreur à travers l'errance de son héros sentencieux littéralement tourmenté par sa condition parentale. L'intrigue s'attachant à décrire par le biais de ses fantasmes et/ou celui du rêve sa situation démunie face au statut paternel puis conjugal. Son amie insomniaque ayant quitter précipitamment le foyer à la suite des braillements de leur bambin, Henry Spencer tente maladroitement de poursuivre sa morne existence en la présence de ce rejeton moribond.


Avec son décor blafard de banlieue industrielle et la sonorité infernale impartie aux bruit des machines et du vent tempétueux, Eraserhead ébranle nos sens, déstabilise nos habitudes sereines pour mettre en exergue le dépaysement d'une glauque scénographie auquel chaque membre d'une famille est servile au mal-être existentiel. Renforçant le malaise parmi la présence fétide d'un foetus difforme (FX bluffants de réalisme !) que Mary a enfantée de manière prématurée, l'intrigue multiplie les évènements nonsensiques au fil de l'introspection mentale du héros en léthargie. Outre le caractère baroque et surréaliste du design d'ameublement auquel cohabitent les personnages excentriques (notamment la dame du radiateur et les parents névrosés de Mary), Eraserhead planifie avec une inventivité schizophrène une descente aux enfers où l'illogisme des situations et l'incompréhension de certains évènements renforcent le malaise d'un bad-trip plus vrai que nature. Par l'acuité visuelle de son imagerie opaque extraite d'un esprit immature en perte de repère avec sa réalité, le film distille un sentiment de mal-être épidermique aussi rigoureux que Massacre à la Tronçonneuse, Martyrs ou encore La Dernière maison sur la gauche. Autant dire que l'expérience successivement éprouvante, oppressante et malsaine n'accorde aucune délivrance au spectateur privé d'émotions ludiques pour l'extraire de ce climat de sinistrose en chute libre.


Expérience horrifique capiteuse parmi l'intensité de sa bande-son dissonante et son florilège de séquences cauchemardesques engendrées par un esprit dépressif incapable de s'assumer, Eraserhead aborde les thèmes de l'adultère, l'infanticide, la démission parentale et conjugale avec une originalité machiavélique. Tour à tour angoissant et étouffant au point de perdre tous nos repères, le film décuple le malaise parmi la présences iconique du bambin alité et celle de l'acteur Jack Nance traînant sa lourde dégaine à la manière d'un somnambule impassible. 
P.S: En raison de l'intensité scrupuleuse de son climat perturbant, les âmes sensibles sont priées d'être averties (le film étant interdit aux - de 18 ans lors de sa sortie)

Bruno Matéï
2èx

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