vendredi 29 août 2014

La Mariée Sanglante / La Novia Ensangrentada

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Ecranlarge.com

de Vicente Aranda. 1972. Espagne. 1h42 (version intégrale). Avec Simon Andreu, Maribel Martin, Alexandra Bastedo, Dean Selmier, Angel Lombarte.

Sortie salles : 12 Février 1975

FILMOGRAPHIE: Vicente Aranda est un réalisateur et scénariste espagnol, né le 9 Novembre 1926 à Barcelone. 1969: Les Cruelles. 1972: La Mariée Sanglante. 1984: A coups de crosse. 1986: Tiemp de silencio. 1987: El Lute, marche ou crève. 1991: Amants. 1993: Intruso. 1994: La Passion turca. 1995: Lumière et Compagnie. 1996: Libertarias. 1998: La mirada del otro. 1999: Celos. 2001: Juana la Loca. 2003: Carmen. 2006: Tirant le Blanc. 2007: Lolita's Club.


Trésor ibérique exhumé de l'oubli par l'éditeur Artus Films, La Mariée Sanglante s'inspire d'un roman de Cheridan Le Fanu pour traiter du vampirisme, entre singularité et audace. On est d'abord frappé par la beauté de ces images oniriques sublimant une nature paisible et les monuments de pierre, quand bien même l'apparence soyeuse des héroïnes se charge d'une aura érotico-sensuelle. Les couleurs du mauve, du vert et du blanc se complétant à merveille pour styliser leur présence quasi surnaturelle. En parallèle, et avec défiance pour l'époque, le cinéaste saupoudre par intermittence des moments horrifiques parfois très sanglants (le rituel d'un arrachage de coeur durant un songe de Susan) dont la poésie morbide nous rappelle les excès esthétiques d'Argento à son apogée. Ainsi, en abordant les thèmes du sadomasochisme, de la phallocratie, du saphisme et du féminisme, Vicente Aranda construit un récit de prime abord abscons et tortueux pour mieux nous égarer face aux persécutions qu'une jeune mariée témoigne durant ses nuits de cauchemar. Car à peine emménagée dans le manoir de son époux, châtelain plus âgé qu'elle n'hésitant pas à lui infliger des jeux sexuels particulièrement cruels, Susan est hantée par l'emprise d'une mystérieuse Carmilla ! Régulièrement, durant ses sommeils, elle se voit contrainte d'assassiner son époux à l'aide d'un poignard affûté. Un peu plus tard, elle apprendra d'ailleurs qu'une ancêtre de son mari avait sauvagement tué son conjoint dans la même tradition. 


Quelques jours plus tard, aux abords d'une plage, le mari de Susan fait la rencontre d'une étrange inconnue ensevelie sous le sable. Souffrante d'amnésie, il décide de l'accueillir chez elle afin de lui prêter main forte. Rapidement, une étrange relation d'affection et de cohésion naît entre les deux femmes, quand bien même Susan est de plus en plus persuadée qu'il s'agit bien de la Carmilla de ses rêves ! Ce bref résumé jouant incessamment avec les notions de rêve et de réalité témoigne d'un intense pouvoir de fascination chez le spectateur embarqué Spoilerdans une liaison vampirique où deux lesbiennes vont s'unir amoureusement pour extérioriser leur haine auprès des hommes. Fin du Spoiler. En particulier ceux témoignant d'un goût masochiste pour la cruauté perverse que le mari de Susan et sa descendance ont acquis dans la tradition. Si la première moitié du récit nous laisse dans la confusion à savoir si Susan souffre véritablement d'hallucinations, Spoiler ! la seconde partie lève le voile sur l'identité de Carmilla et ses motivations avec l'entremise de sa nouvelle proie asservie par une morsure de vampire Fin du SpoilerOr, la manière originale dont Vicent Aranda structure son intrigue est d'autant plus déconcertante qu'il distille un climat d'étrangeté ensorcelant parmi l'érotisme candide de ces deux misandres. Quand au final en demi-teinte déployant une violence sanglante radicale, il laisse place à un rebondissement cynique quand à découvrir qui emportera la victoire entre les deux sexes.


Cauchemar éveillé faisant office de romance macabre parmi la beauté épurée de ses actrices, la Mariée Sanglante sous-tend une plaidoirie pour l'émancipation féminine lorsque le machisme primaire de l'homme laisse transparaître un goût douteux pour la violence perverse. Erotique et sensuel, trouble et vertigineux, baroque et parfois ultra sanglant (avec en sus une séquence anthologique toujours aussi bluffante), il empreinte le mythe du vampire avec autant d'esthétisme pictural que d'originalité scabreuse. L'une des pièces fondatrices du cinéma fantastique espagnol en somme.

Bruno 
23.04.23. 3èx

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