mercredi 18 juin 2014

JOE. Prix Marcello-Mastroianni pour Tye Sheridan, Mostra de Venise 2013

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de David Gordon Green. 2013. U.S.A. 1h57. Avec Nicolas Cage, Tye Sheridan, Ronnie Gene Blevins, Gary Poulter, Adrienne Mishler, Sue Rock, Heather Kafka.

Sortie salles France: 30 Avril 2014. U.S: 11 Avril 2014

Récompenses: Prix Marcello-Mastroianni pour Tye Sheridan lors de la Mostra de Venise, 2013.

FILMOGRAPHIE: David Gordon Green est un réalisateur américain, né le 9 Avril 1975 à Little Rock (Arkansas). 2000: George Washington. 2003: All the real girls. 2004: L'Autre rive. 2007: Snow Angels. 2008: Délire Express. 2009: Kenny Powers. 2011: Votre Majesté. 2011: Black Jack (télé-film). 2012: Baby-sitter malgré lui. 2013: Prince of Texas. 2013: Joe. 2014: Manglehorn.


"Tant que je me maîtrise, je reste en vie...Ca m'empêche de finir en taule."
Après avoir accumulé nombre de nanars impayables depuis une bonne dizaine d'années, Nicolas Cage nous revient enfin en grande forme dans son rôle sur mesure d'ancien taulard en perdition. Film coup de poing habité par la colère et la rage de survivre au sein d'une Amérique profonde peuplée de clodos et de marginaux véreux, Joe rend hommage à la condition ouvrière avant de relater la dérive justicière d'un loup solitaire épris d'amitié pour un ado maltraité. Le pitchAlors que son paternel alcoolo passe son temps à évacuer l'ennui dans la bouteille, le jeune Gary tente de trouver un job d'intérim afin de subvenir aux besoins de sa famille. C'est auprès de Joe Ransom qu'il réussit à se faire embaucher pour abattre les arbres d'une forêt sinistrée. Peu à peu, une solide amitié se noue entre eux quand bien même Gary continue de subir les humiliations quotidiennes de son père


Superbes portraits d'écorchés vifs impartis à un quadra impulsif rongé par l'injustice d'un passé judiciaire, et à celui d'un adolescent en recherche paternelle, Joe juxtapose leurs blessures morales dans une intrigue tortueuse où le danger omniprésent ne cesse de rattraper leur destin. La qualité première de ce drame psychologique particulièrement tendu et pessimiste émane de la sobriété des comédiens incarnant avec naturel des protagonistes marginaux en quête de réinsertion dans une Amérique gangrenée de misère. Celle de la campagne texane où se côtoient prolétaires, crapules à la petite semaine, prostituées de bordel miteux et laissés pour compte. Ainsi, en alternant les séquences intimistes de personnages hantés par l'amertume, le regret et l'échec, David Gordon Green insuffle une poésie lyrique à travers leur démarche hagarde au sein d'un environnement solaire terni par la désillusion sociale. Accentué d'une musique mélancolique et d'effets de ralenti extatiques, le film distille un climat d'envoûtement éthéré avant de nous précipiter dans le gouffre d'une intrigue nébuleuse constamment sur le qui-vive. Et si à mi-chemin, on imagine le drame prévisible qui se dessine après avoir été témoin d'un évènement crapuleux particulièrement innommable, le réalisateur adopte un virage pour repousser l'attente d'un inévitable concours de circonstances où le déchaînement de violence ne laissera aucune place à l'absolution. Autour de ces instants de tension exponentielle où la rage d'un ex taulard commence à prendre du galon pour laisser s'exprimer révolte suicidaire et désir de vengeance, Joe met en exergue l'ultime ambition d'un père épris de sacrifice pour prémunir la vie d'un fils qu'il n'a jamais pu engendrer. Cette histoire d'amitié paternelle entretenue entre lui et Gary laissant exprimer une émotion intense à travers leur rapport de tendresse et de confiance, leur permettant ainsi de converger à une initiation responsable malgré l'improvisation d'une issue tragique. 


Valse du tueur
De par son climat poisseux imbibé de sinistrose et du portrait en décrépitude asséné aux rednecks burinés, Joe ne cesse de confronter déchéance humaine, désillusion et désir de rédemption autour d'un justicier incontrôlable et d'un ado persévérant. Nicolas Cage et le jeune Tye Sheridan formant de manière prude un duo complémentaire dans leur rage de survivre, quitte à s'y brûler les ailes. Grand moment d'émotion, du cinéma viril âpre et hargneux !

Bruno Matéï

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