mercredi 2 janvier 2013

LES NERFS A VIF (Cape Fear)

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site mediafilm.ca

de Jack Lee Thompson. 1962. U.S.A. 1h46. Avec Robert Mitchum, Gregory Peck, Polly Bergen, Lori Martin, Martin Balsam, Jack Kruschen, Telly Savalas, Barrie Chase.

Sortie salles France: 31 Octobre 1962. U.S: 18 Avril 1962

FILMOGRAPHIE SELECTIVEJack Lee Thompson (John Lee Thompson), est un réalisateur, scénariste et producteur britannique, né le 1er Août 1914 à Bristol (Royaume-Uni), décédé le 30 Août 2002 à Sooke (Canada). 1955: An Alligator Named Daisy. 1959: Aux Frontières des Indes. 1959: Les Yeux du Témoin. 1961: Les Canons de Navarone. 1962: Les Nerfs à Vif. 1962: Tarass Boulba. 1963: Les Rois du Soleil. 1964: Madame Croque-maris. 1965: l'Encombrant Monsieur John. 1966: l'Oeil du Malin. 1969: l'Or de Mackenna. 1969: l'Homme le plus dangereux du monde. 1970: Country Dance. 1972: La Conquête de la Planète des Singes. 1973: La Bataille de la Planète des Singes. 1976: Monsieur St-Yves. 1977: Le Bison Blanc. 1979: Passeur d'Hommes. 1980: Cabo Blanco. 1981: Happy Birthday. 1981: Code Red (télé-film). 1983: Le Justicier de Minuit. 1984: l'Enfer de la Violence. 1984: l'Ambassadeur: chantage en Israel. 1985: Allan Quatermain et les Mines du roi Salomon. 1986: La Loi de Murphy. 1986: Le Temple d'Or. 1987: Le Justicier braque les Dealers. 1988: Le Messager de la Mort. 1989: Kinjite, sujets tabous.


Un an après les Canons de Navarone, Jack Lee Thompson change de registre afin d'adapter un roman noir de John D. MacDonald, The Executioners. Rebaptisé Les Nerfs à vif, ce thriller intense et captivant doit beaucoup à l'affrontement dantesque de ces deux antagonistes, partagés entre une rancoeur vindicative et la préméditation meurtrière.

Après avoir purgé une peine de 8 années de prison, un psychopathe décide de se venger du responsable de sa condamnation, en s'en prenant notamment à sa famille. La victime est un paisible avocat, Sam Bowden, préalablement témoin du viol d'une jeune fille commis par Max Cady. Depuis sa sortie de prison, ce violeur rongé de haine et de vengeance s'évertue à épier les moindres faits et gestes de l'avocat, en harcelant également sa femme ainsi que sa fille.


Thriller austère pourvu d'un suspense oppressant, les Nerfs à Vif est un superbe affrontement psychologique confié entre deux monstres sacrés du cinéma. L'un s'attribuant le rôle d'un criminel cynique dénué de vergogne pour accomplir sa vengeance méthodique, l'autre endossant celui d'un notable avocat finissant peu à peu par sombrer dans une paranoïa délétère. Outre le caractère anxiogène des méfaits impudents perpétrés par un redoutable psychopathe, la déchéance morale impartie au magistrat, paisible père de famille, s'alloue d'une éthique équivoque pour sa planification meurtrière. En traitant de l'abus de pouvoir chez la déontologie policière, le réalisateur aborde pour autant une réflexion sur la légalité législative quand un meurtrier décide de nuire à autrui sans employer de prime abord une violence physique. Si les Nerfs à vif se révèle si captivant, c'est qu'il s'attarde à relater avec beaucoup d'efficacité la confrontation paroxystique de deux hommes engagés dans une épreuve de force. Par petites touches, Jack Lee Thompson distille en amont une tension progressive quand, par exemple, Max Cady décide de surveiller la fille du magistrat. La séquence perfide où l'adolescente, réfugiée en interne d'une école, est persuadée d'être poursuivie par son tortionnaire, est un joli moment d'appréhension dans son subterfuge toléré. Outre les incessantes provocations verbales prononcées par Max Cady sur la modeste famille, d'autres moments forts surprennent par une violence physique quelque peu acerbe  (l'agression à coup de chaîne de Cady par les trois complices de Bowden). L'intrusion soudaine du meurtrier à bord de la péniche afin d'appréhender l'épouse esseulée est également une estocade particulièrement perverse dans son allusion sexuelle. Quand au fameux point d'orgue escompté, il culmine sa déchéance morale vers un survival abrupt au sein d'une rivière crépusculaire. En prime, son épilogue inopiné milite en faveur d'une justice équitable réfutant la loi du talion pour mieux consigner son coupable meurtrier. Si on peut saluer la sobriété d'interprétation du grand Gregory Peck dans celui d'un avocat attisé par la corruption, l'immense Robert Mitchum s'alloue d'une prestance flegmatique pour incarner un ex-taulard haineux, gagné par une vengeance redoutablement rusée. La petite Lori Martin se révèle notamment particulièrement expansive dans la peau d'une adolescente candide endurant divers tourments psychologiques.


D'un point de vue personnel, j'aimerais souligner que j'accorde plus d'affection au remake homonyme élaboré 30 ans plus tard par l'illustre Martin Scorcese. Parce que plus intense, éprouvant, cinglant et violent, cet exercice de style virtuose n'hésitait pas non plus à évoquer un certain tabou (l'allusion sexuelle particulièrement équivoque entretenue durant un aparté entre Robert De Niro et la jeune adolescente Juliette Lewis). Mais le classique originel de Jack Lee Thompson, rehaussé du score orchestral d'Herrmann, reste suffisamment dense et maîtrisé pour daigner le discréditer. D'autant plus que l'interprétation démoniaque de Robert Mitchum mérite à elle seule le détour !

02.01.13
Bruno 

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