vendredi 6 janvier 2012

POLISSE. Prix du Jury à Cannes.


de Maïwenn Le Besco. 2011. France. 2h07. Avec Karin Viard, Marina Foïs, Joey Starr, Nicolas Duvauchelle, Karole Rocher, Lou Doillon, Riccardo Scamarcio, Frédéric Pierrot, Emmanuelle Bercot, Jérémie Elkaïm.

Sortie en salles en France le 19 Octobre 2011.

FILMOGRAPHIE: Maïwenn Le Besco est une réalisatrice, actrice, scénariste française, née le 17 Avril 1976 aux Lilas (Seine-Saint-Denis). 2004: I'm an actrice (court-métrage). 2006: Pardonnez moi. 2009: Le Bal des Actrices. 2011: Polisse


Pour son 3è film, l'actrice réalisatrice Maïwen nous assène un véritable uppercut à l'instar du docu-vérité pour suivre la quotidienneté éprouvée de policiers de la BPM (Brigade des protections des mineurs) confrontés aux garde à vue de pédophiles mais aussi à leur discorde conjugale sitôt rentrés au cocon familial. Ainsi, à travers le quotidien de ces policiers dans une commune de Paris, Melissa, jeune photographe, est recrutée pour suivre leur labeur professionnelle et rédiger un reportage édifiant. Avec souci de réalisme proche d'un L.627 de Bertrand Tavernier, la jeune réalisatrice Maïwen nous retranscrit le quotidien abrupt d'un groupe de flics solidaires délibérés à protéger les mineurs contre les pédophiles de tous bords ou des maltraitances infligées par des parents incapables d'assumer leur fonction parentale. De par la complicité d'une flopée de comédiens d'un naturel confondant à travers leur physionomie ordinaire, Polisse nous plonge en interne de leur psyché évoluant dans une jungle urbaine en ébullition si bien que les enfants y demeurent les dommages collatéraux.


Le réalisme acéré des situations glauques ou dérangeantes provoquant souvent gêne et malaise, voir parfois même l'insupportable lorsqu'une jeune ado violée prend subitement conscience d'avoir mis au monde un bébé mort-né. Avec souci d'humanisme éprouvé, voir désespéré auprès de certains représentants de l'ordre irascibles ou téméraires, la réalisatrice nous dépeint sans esbroufe ni pathos le destin de ces flics acolytes constamment contrariés (voir pour certains, au bord du marasme suicidaire). Par conséquent, elle nous dévoile avec une sobre dignité une autre facette de la police souvent taxée d'incompétente à travers le français moyen désireux de leur devoir de protection. En l'occurrence, ces policiers de la BDM s'avèrent ici des êtres humains ordinaires débordant de vitalité et de courage mais aussi accablés par les infortunes et leur fêlure morale d'une vie conjugale en déséquilibre. Le film traitant également de la gestion disciplinaire d'une hiérarchie policière à bout de souffle si bien que certains collègues dépités sont facilement au bord de l'implosion. Il sous entend notamment les failles juridiques d'une société davantage dépourvue de subvention afin de pouvoir loger les sans abris dans des foyers saturés.


Avec une lucidité édifiante, Maïwen nous dresse donc un constat implacable envers cette nouvelle génération sévèrement réprimée ou violée par des adultes sans vergogne à travers leur pathologie perverse. Elle nous dévoile également sans tabou le comportement irresponsable d'adolescentes endoctrinées par l'univers virtuel d'internet et de ses dérives sexuelles par jeu de provocation ou de soumission lubrique sollicités par des camarades de classe. Il y a aussi la précarité endurée par des roumains coexistants dans des caravanes insalubres, acculés à faire travailler illégalement leur bambin. Quand bien même certaines africaines sans domicile se voient contraintes d'abdiquer leur enfant dans un foyer, faute de ne pouvoir subvenir à leur besoin. Sans compter ses quidams toxicomanes ou ses mères immatures incapables d'endosser la responsabilité d'un enfant pour pouvoir dignement l'assumer. Le choix idoine des comédiens sélectionnés parfois à contre emploi (Karin Viard et Marina foïs sont époustouflantes d'animosité dans leur conflit d'égo !) renforce son cachet d'authenticité de par leur posture brute de décoiffage. Pour preuve également, la prestance fortuite de Joey Star en flic obtus nous surprend admirablement tant il parvient à retranscrire avec une vérité humaine chétive son désarroi de ne pouvoir immuniser tous les maux de notre société.

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L'île aux enfants
Débordant de vigueur de par la posture contrariée des protagonistes s'extériorisant parfois avec une rage incontrôlée mais pour autant constamment imprimés d'un humanisme à fleur de peau, Polisse se décline en drame social d'une rare puissance émotionnelle. La cohésion vigoureuse des comédiens particulièrement autoritaires ainsi que sa mise en scène incisive au plus près de leurs sentiments nous accablent l'esprit à travers leur combat quotidien contre l'injustice. Ainsi, après tant d'émotion parfois décuplée avec âpre verdeur, il nous est impossible de sortir indemne de ce brûlot sociétal, d'autant plus que son épilogue inopinément tragique nous laisse sur le bitume à travers son aigreur victorieuse. 

*Bruno
06.01.11

Récompenses: Prix du Jury à Cannes 2011.
Premier Grand Prix Cinéma du magazine Elle.
Prix du Public Mel Hoppenheim au Cinémania 2011.


8 commentaires:

  1. Hi Bruno,
    il est vrai que ce film, malgré des maladresses surtout liées à la présence de Maïwenn dans le casting (son personnage "béquille" n'apporte pas énormément) est vraiment très intéressant, c'est aussi la révélation d'un magnifique comédien : Joey Starr. Je profite de ce commentaire pour laisser un lien vers une de nos émissions récentes dans laquelle figure une interview de Maïwenn :
    -Le sommaire : http://culture-prohibee.blogspot.com/2011/11/dans-culture-prohibee-ce-mardi-08.html
    -Le podcast : http://213.246.53.78/grafhit/podcast/cultureProhibee/CP_S3E10_polar.mp3
    Bonne écoute à toutes et à tous.

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  2. merci pour les liens ! ^^ (par contre les maladresses liés à la présence de Maiwen, suis pas du même avis)

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  3. Je ne remets pas en cause ses qualités d'actrice et de metteur en scène, je trouve juste que son personnage ne sert pas l'histoire et que l'amourette avec Joey Starr n'est pas non plus très passionnante. Ce personnage qui représente le point de vue du spectateur est pour moi une sécurité qu'a mise en place Maïwenn en tant que réalisatrice. Pour le reste j'apprécie le film qui, malgré quelques scènes tire-larmes (celle avec l'enfant que sa maman souhaite abandonner et qui se réfugie dans les bras de Joey Starr traîne trop en longueur), comporte un grand nombre de moments purements magiques (la scène du bus, celle de la boîte de nuit) et hilarants (la confrontation avec le musulman intégriste). Cette cinéaste confirme, après un second film déjà très bon (Le Bal Des Actrices), qu'il va falloir compter sur elle dans les années à venir.

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  4. (celle avec l'enfant que sa maman souhaite abandonner et qui se réfugie dans les bras de Joey Starr traîne trop en longueur). Pas pour moi...

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  5. Cette scène ( le p'tit black qui hurle dans les bras de Joey ) avec l 'accouchement du BB mort né sont une des scènes les plus touchante , j 'ai même l 'impression que ce gamin ne joue pas la comédie et que la scène a été vrais ...

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  6. on dirait que tu viens de parler à ma place Jenny !

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  7. Je pense que c 'est pas de la comédie et si c 'est le cas le gosse est puissant , car comment on ressent sa douleur , un truc de fou !

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  8. Je me suis posé la même question par rapport à la scène du gamin, et vu la réaction de Joey Starr, je pense effectivement qu'il y a du avoir un problème car il a l'air aussi effondré que le petit... Rien que d'en reparler j'ai envie de pleurer...

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