mercredi 2 novembre 2011

POUPOUPIDOU


de Gérald Hustache Mathieu. 2010. France. 1h42. Avec Jean-Paul Rouve, Sophie Quinton, Guillaume Gouix, Olivier Rabourdin, Clara Ponsof, Arsinee Khanjian, Eric Ruf, Lyes Salem, Joséphine de Meaux, Ken Samuels.

Sortie en salles en France le 12 Janvier 2011

FILMOGRAPHIE: Gérald Hustache Mathieu est un réalisateur français né en 1968 dans la ville d'Echirolles, en Isère dans la banlieue sud de Grenoble.
1996: J'ai horreur de l'amour (assistant réalisation). 2001: Peau de Vache (court). 2003: La Chatte Andalouse (moyen métrage). 2006: Avril. 2011: Poupoupidou


Après un premier film remarqué pour sa poésie libertaire, Gérald Hustache Mathieu entreprend avec Poupoupidou (titre énigmatique un peu peu réducteur), un polar insolite et décalé façonné dans le moule de la comédie atypique. Illuminée par la fonction pétillante de Sophie Quinton, cette ovni gracieux enchante subtilement le spectateur par son aura fantasmagorique. Un écrivain en panne d'inspiration découvre sur une route enneigée le cadavre d'une blonde surnommée Candice Lecoeur. Intrigué par ce potentiel suicide, il va tenter de remonter le passé pour découvrir la vérité sur cette égérie de Franche Comté grâce à son journal personnel. Peu à peu, il se rend compte que d'étranges similitudes avec la vie notoire de Marilyn est agréée avec celle de Candice. Pour renouer avec l'ambition de sa profession, il profite également de cette étrange enquête pour entamer la rédaction de son nouveau roman. 



Avec la structure désincarnée et impondérable d'un scénario aussi insolite, difficile de rester inflexible face à un film aussi étrange, lyrique et enivrant. A partir d'un argument policier orthodoxe, l'intrigue foisonnante va rapidement s'acheminer vers un itinéraire excentrique remplie de situations cocasses, attendrissantes ou graves, compromises avec des personnages sournois, indécis, distraits et rêveurs, en quête de gloire ou de reconnaissance. Formellement, Poupoupidou flirte incessamment avec l'onirisme enchanteur dans un parti pris baroque (variante de nuances polychromes picturales) et avec la pétulance d'une jeune blonde avide de rencontrer l'amour mais persuadée d'être la réincarnation de Marilyn Monroe. Gérald Hustache Mathieu oscille les genres avec une aisance fulgurante et nous narre avec fantaisir une idylle impossible entre deux êtres que tout sépare malencontreusement. En résulte une perpétuelle puissance émotionnelle sous-jacente dans les investigations utopistes d'un écrivain passionné par les états d'âme fébriles d'une star trop vite élevée au rang d'égérie jusqu'au fameux climax révélateur d'une rédemption déchirante.


Pour l'interprétation, Jean Paul Rouve surprend avec sobriété dans un rôle à contre-emploi de romancier contrarié mais subitement inspiré par un fait divers macabre simulé en suicide. Modérément touchant et discrètement amoureux d'une femme subitement balayée par la mort, il reconstruit peu à peu le puzzle écorné de sa nouvelle Marilyn pour finalement découvrir un semblant de relation interposée. Sans fioriture, Sophie Quinton irradie l'écran de sa physionomie lascive pour émailler les campagnes publicitaires auquel elle doit user de sa suavité pour convaincre la société de consommation. Et en particulier la gente masculine fascinée par ses formes charnelles et son pouvoir érotique sensiblement aguichant. Sa présence féminine d'une beauté épurée hors norme insuffle au fil du récit une aura irrationnelle délicatement souple et envoûtante. Le spectateur rendu transi n'étant pas prêt d'oublier le talent de cette actrice néophyte au potentiel naturel !


Lestement mis en scène dans une chimère romanesque inimitable, Poupoupidou est un poème en demi-teinte. Aussi frais, éthéré, drôle, angélique et passionné que lugubre, nonchalant, touchant et tragique dans le rêve insoluble que se partagent David et Candice. Par l'hypocrisie, la cupidité des hommes et la providence d'un hasard inéquitable, leur frêle destin s'édifie en conte désenchanté inscrit dans l'élégie. La désillusion fatale de deux êtres candides séparés par la mort mais dont leur liaison sous-jacente va finalement se convertir au travers d'une lettre de compassion. Poupoupidou étant finalement l'histoire fragile d'une princesse incomprise par qui la célébrité orgueilleuse aura tout détruit. On s'extrait de l'esprit de Candice bouleversé et hanté par sa stature de nouvelle Marilyn destinée à répéter sa légende brocardée.

Dédicace à Damval Dulac.
02.11.11
Bruno Matéï



2 commentaires:

  1. "Autopsie d'un fantasme"
    Tous les cinéastes français ne filment pas deux clampins qui refont le monde dans le bureau de
    tabac du coin de leur rue. Pour preuve, ce film intéressant qui ballade le spectre d'un des plus grands miracles cinématographiques - Norma Jean Baker alias Marilyn Monroe - sur les terres malades de Laura Palmer, l'une des victimes expiatoires de David Lynch. Les deux fictions, car Marilyn était aussi une fiction, ont bien des points communs. Chacune, tour à tour victime et bourreau, d'un jeu qui finit par leur échapper. Le postulat du film d'Hustache-Mathieu est amusant mais clopine assez vite dans la neige jurassienne si l'on connait un peu, beaucoup, passionnément l'itinéraire d'Alice au Pays des Névroses de la Monroe; ce symbole dont on imprime toujours la
    légende brisée, au risque d'effacer la part d'ombre. Puisqu'il est également fait référence dans le dialogue à James Ellroy, on dira qu'il est difficile de filmer l'obsession graduelle, surtout quand l'objet de cette fixation est un cadavre. Le cinéaste-cinéphile, avec la passion sincère qui anime son voyage, y croit lui. Croyance en la force des symboles auxquels il se donne, croyance naïve du coeur qui anime l'histoire réinventée. Mais le pouvoir évident de l'objet ne peut pas tout soutenir et effacer les poncifs ( l'éternel écrivain en mal d'inspiration). Sophie Quinton, aussi charmante soit-elle, n'est pas Norma Jean et Jean-Paul Rouve, pas mauvais mais stoïque, ballade une seule expression pendant cent minutes. Entre la morte et le fantasme qui la maintient dans un état de survie déviant, le cinéma - celui que l'on crée - doit habiter les lieux. Faire parler les silences est toujours affaire de pinceaux, or les limites du maître d’œuvre sont rapidement atteintes quand il nous offre en contraste Mouthe sous la neige au son de "California Dreamin'". Traversé parfois par quelques images sensibles, le morceau est trop
    gros. Il y a péché d’orgueil. Un peu comme tous ces hommes qui pensèrent bêtement dompter et
    capturer le mustang Norma Jean. Dans cette chronique d'une mort en reprise, le malaise, l'insidieux et la grâce de l'entre-monde et de sa victime ne sont jamais devinés. La métamorphose de la fille du coin en Eva prima donna est anecdotique. L'intrigue quant à elle souffre d'un agencement trop facile et automatique des éléments de l'enquête, lesquels s'ajustent comme un lego basique où la métempsychose est affaire d'alphabet. A contrario, le sujet fait preuve d'une ironie iconoclaste amusante en revoyant à la baisse l'itinéraire de la star. A l'arrêt d'autobus, toutes les blondes vraies ou fausses sont Marilyn Monroe. Dans les grandes limites des auteurs, "Poupoupidou" est un film estimable, agréable, qui a comme grand mérite d'être universel et d'inscrire toujours d'abord
    ce que le cœur nomme en premier.

    RépondreSupprimer
  2. Jean paul Rouve......Me laisse de marbre...cela risque de pas le faire.
    rien que pour cela....
    Son interprétation de Spaggiari m'a hélas définitivement convaincu qu'il s'était gouré de métier.
    C'est dur à dire..,l'égout et les couleurs...

    RépondreSupprimer