mardi 8 novembre 2011

Portier de Nuit / Il portiere di notte

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Liliana Cavani. 1974. Italie/France. 1h58. Avec Dirk Bogarde, Charlotte Rampling, Philippe Leroy, Gabriele Ferzetti, Giuseppe Addobbati, Isa Miranda, Nino Bignamini, Marino Masé, Amedeo Amodio, Piero Vida.

Sortie en salles en France le 3 Avril 1974 (Int - 18 ans). U.S: 1 Octobre 1974

FILMOGRAPHIE: Liliana Cavani est une réalisatrice italienne, née le 12 Janvier 1933 à Carpi (Emilie-Romagne). 1966: Francesco d'Assisi. 1968: Galileo. 1969: Les Cannibales. 1972: l'Ospite. 1974: Milarepa. Portier de Nuit. 1977: Au-dela du bien et du mal. 1981: La Peau. 1982: Derrière la porte. 1985: Berlin Affair. 1989: Francesco. 1992: La Traviata. 1993: Sans pouvoir le dire. 2002: Ripley s'amuse. 2005: De Gasperi, l'uomo della speranza. 2008: Einstein (téléfilm).


Une oeuvre profondément scabreuse impossible à "aimer" dont les images incongrues, difficilement acceptables, laissent d'inévitables traces de par la force de la mise en scène et du jeu transi des acteurs damnés.

Oeuvre polémique à sa sortie, rarement diffusée en salles ou à la T.V, classé X aux Etats-Unis, Portier de Nuit est une oeuvre sulfureuse et dérangeante sur l'amour interdit d'amants compromis. Si bien qu'un parfum de scandale s'esquisse autour de la relation sadomasochiste d'un ancien tortionnaire nazi et de sa maîtresse déportée juive toujours aussi fascinée par leurs plaisirs éhontés. A moins que celle-ci ne soit finalement victime du syndrome de Stockholm au sein d'un huis-clos intimiste en déliquescence physique et morale. Le pitchA Vienne, en 1957, Max travaille comme portier de nuit dans un grand hôtel. Un jour, il reconnait son ancienne maîtresse, aujourd'hui mariée à un chef d'orchestre d'opéra. Leur relation amoureuse eut été préalablement établie sous le régime nazi alors que Lucia fut envoyée dans un camp de concentration. Aujourd'hui, ils décident de renouer leur lien passionnel mais des officiers nazis, anciens compatriotes de Max, manifestent leur inquiétude face à ce témoin capital potentiellement capable de les dénoncer pour leurs antécédentes exactions. Considéré comme le chef-d'oeuvre baroque de sa carrière politique, la réalisatrice Liliana Cavani dépeint avec verdeur et réalisme clinique le portrait d'un couple en réconciliation après avoir entretenu une relation passionnelle durant le règne despotiste du 3è Reich. Alors qu'il fut officier nazi chargé d'envoyer à la mort des milliers de juifs parqués dans les camps de concentration, Max tomba subitement amoureux d'une jeune déportée juive du nom de Lucia. D'abord réticente et pétrifiée pour l'objet de soumission qu'elle représente, la jeune fille se laisse peu à peu entraîner dans une relation masochiste alors que le génocide de son peuple est en pleine expansion. Quelques années plus tard, ils se retrouvent par hasard d'une représentation théâtrale dans laquelle le mari de Lucia est chef d'orchestre renommé.


De prime abord fuyante et angoissée de retrouver son précédant amant tortionnaire, la jeune femme se laisse attendrir par ses pulsions sexuelles refoulées, faute d'une romance fusionnelle indocile afin de renouer avec leur relation torturée d'humiliations et d'amour extraverti. Ainsi, dans une photographie blafarde illustrant avec froideur un climat austère renforçant son caractère trouble, dérangé, antipathique, Liliana cavani nous entraîne dans une impossible histoire d'amour auquel deux amants torturés par la culpabilité souhaitent malgré tout vivre jusqu'au bout leur désir sulfureux d'un rapport autodestructeur. Ainsi, en confrontant cette audacieuse romance galvaudée du spectre tyrannique du nazisme, la réalisatrice établie un parallèle malsain pour notre sentiment interne face à la fascination / répulsion du Mal. Comme si Lucia, martyrisée par un gouvernement dictatorial souhaitait entamer cette relation putanesque dans une sexualité sadique oscillant jouissance et douleur pour fuir, omettre inconsciemment l'agonie de milliers d'innocents juifs morts dans des conditions infâmes. Dans le rôles des amants maudits, Dirk Bogarde impressionne dans une force d'expression bicéphale puisque contenue ou autrement furibonde à travers sa prestance déloyale d'ancien tortionnaire SS, épris d'amour fou pour une jeune juive subitement fascinée par ses rapports de soumission. Pour la présence meurtrie et ambiguë de Lucia, Charlotte Rampling  hypnotise l'écran face à son regard velouté de sombre féline, son attachement irrésistible auprès des actes abusifs de Max, formant tous deux les amants maudits d'une idylle incongrue. 


Déshonneur du désordre amoureux.
Superbement mis en scène sans esbroufe car renforcé d'une sobriété autonome de la part de sa réalisatrice, Portier de Nuit demeure un fascinant poème noir sur le destin de ces amants fous déterminés à fuir leur sinistre existence à travers les liens de l'épanouissement amoureux. Transcendé du jeu réaliste des deux comédiens se livrant corps et âme face à une caméra introspective, ce drame d'amour nécrosé dégage un parfum de souffre aussi malsain que tragiquement mélancolique. Ainsi, il en résulte une oeuvre austère étouffante, hallucinée, abstraite, renfrognée, malaisante au possible, difficile à suivre, car insoluble à digérer sitôt la projection close. Si bien qu'aucun personnage ne nous évoque une parcelle d'empathie à travers leur culpabilité impardonnable d'une emprise délétère. 

*Bruno
08.11.11
15.09.22

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