mercredi 9 mars 2011

A SERBIAN FILM (Srpski film)

                                                                                  Photo emprunté sur Google, appartenant au site filmsfix.com

de Srdjan Spasojevic. 2010. Serbie. 1h47. Avec Sergej Trifunovic, Jelena Gavrilovic, Katarina Zutic, Slobodan Bestic.

Interdit en salles en France. Sortie Blu-ray: 2 Février 2012

FILMOGRAPHIE: Srdjan Spasojevic est un réalisateur et scénariste serbe né en 1976 à Belgrade.
2010: A Serbian Film. 2012: The ABC of Death ( "R Is for Removed").

                                            AVERTISSEMENT: Interdit aux - de 18 ans. 


Avis à chaud après une expérience immorale aussi jusqu'au-boutiste car nous entraînant dans l'incongru sans aucune retenue ! Srdjan Spasmodique, réalisateur, producteur et scénariste, ayant échafaudé un premier film hybride (trait d'union entre le cinéma d'exploitation et le film d'auteur) scandaleusement décrié partout où il fut projeté dans divers festivals et projections privées. Sans anesthésie, A Serbian Film tente de repousser les limites du trash en dénonçant les pratiques davantage frauduleuses du buziness du sexe consommé sans modération. Un voyage au bout de l'enfer Serbe, une forme d'écho indirect à Combat Schock (révolte, haine et régression dans un climat social bouleversé par les conflits politiques), Bad lieutenant (l'âme souillée en quête d'une rédemption) voir aussi à Bad Biology (l'addiction sexuelle exacerbée jusqu'à overdose). Milos, ancienne star serbe, étalon du X, reprend du service auprès d'une de ses amies pour l'acquisition d'un contrat tenu secret par un producteur. L'entrepreneur véreux étant un fan invétéré des talents sexuels du hardeur. Seulement Milos élude les conditions du contrat et signe en reconnaissance d'un gain faramineux. C'est le début d'un Voyage au bout de l'enfer du sexe et de l'ultra violence... 


A serbian film nous décrit donc la descente licencieuse d'un hardeur autrefois maître de ses désirs, de son équilibre et de ses états d'âme pour une profession marginale aussi dépréciée de l'opinion. Quand bien même la comédienne esclave, soumise, est souvent réduite à un objet de consommation et de domination. En l'occurrence, Milos est en retraite mais contraint de reprendre du service pour subvenir aux besoins de sa famille. Un groupuscule mafieux décide donc de l'asservir pour le compte d'un film porno inspiré de la télé-réalité. Qui plus est, Milos ne sera jamais averti de l'agencement du scénario et de l'affiche des comédiens inconnus. Les conséquences psychologiques seront irrémédiables pour lui face à l'horreur oppressive des situations. Cette nouvelle tendance cinématographique étant façonnée dans le but d'authentifier autant que possible les séquences extrêmes vulgairement mises en boucle. Spoiler ! Les séquences pornographiques sans limite devenant plus obscènes et dénuées de compassion pour les victimes mises à épreuve. Comme celui de faire intervenir une mère et sa fille sans savoir au préalable si nous avons affaire à des comédiennes assumées ou à des quidams pris en otage contre leur gré ! La sexualité mise en exergue de manière bestiale va furtivement s'affilier à une violence permissive afin de rendre complice un Milos désorienté car dérouté de ce climat crapuleux. Un florilège d'exactions improbables vont donc se perpétrer avant de commettre l'irréparable: le meurtre en direct ! Plus communément prénommé snuff movie auquel notre étalon complètement drogué au viagra et ecstasies participera sans modération. Le lendemain du drame, notre cobaye épris de réminiscence et en perte de repère s'aperçoit qu'il a été trompé en visionnant les vidéos laissées en témoignage sur camescope. Mais quand la pire des révélations est à venir, il est déjà trop tard, plus possible de faire marche arrière ! Fin du Spoiler.


Dans une réalisation soignée, à l'instar de son design d'ameublement et de sa photo léchée, le réalisateur Srdjan Spasmodique traite du thème de la pornographie sans concession requise. Un empire du sexe ouvertement dévoilé par le biais de la pellicule pour le mettre en pratique de la manière la plus malsaine et brutale possible ! Le cinéaste y dénonçant un univers davantage corrompu par la demande addictive d'une clientèle insatiable toujours plus exigeante. Jusqu'où peut-on braver les interdits pour satisfaire les pires instincts de la bassesse humaine ? Ce sont surtout dans les pays précaires où le totalitarisme règne en maître que les actes les plus tendancieux sont commis chez une population martyrisée par les guerres civiles entre la Yougoslavie et la Serbie. Certaines scènes tournées en extérieure dans un souci documentaire montrent bien l'état d'esprit d'une démographie discrète où seuls les marginaux sortent librement la nuit (l'agression de Milos par 2 dealers qui s'étaient empressés de violer une mineure). L'impact cinglant du film est de démontrer explicitement qu'à force de mettre en pratique un hardeur plongé dans une sexualité sans limites, un monstre erratique peut en être enfanté. Dans la peau de Milos, l'interprétation névralgique de Sergej Trifunovie s'avère saisissante d'intensité viscérale ! Il faut d'ailleurs le voir la larme à l'oeil lors de l'épilogue traumatique, se permettant au passage d'effleurer notre empathie dans sa condition lamentée !


A serbian Film ne pourra jamais faire l'unanimité, faute de sa radicalité à affronter de manière extrême les pires démons de nos bas instinctsIl s'agit à mon sens personnel d'un témoignage transgressif sur une société malade de ses repères, davantage enracinée dans une solitude si bien que les citoyens se confinent dans une pornographie omniprésente. A Serbian Film s'avérant un cauchemar séminal sous couvert d'une réflexion universelle sur l'identité sexuelle, ses dérives, son influence sur l'image et sa part d'hypocrisie (la femme de Milos lui proposant de se faire baiser comme une "chienne" après la projection d'un X). Un portrait abrupt de notre société contemporaine confinée dans une dérangeante détresse sans toutefois céder outrancièrement à la gratuité (exception faite avec la scène du sexe dans l'oeil aussi grotesque que vaine.). Cet électro-choc émotionnel peut aussi se concevoir comme une projection cathartique, un purgatoire envers la bête qui sommeille en chacun de nous. Au final, il est donc impossible de sortir indemne de cette expérience aussi éprouvante (la partition musicale stridente amplifiant notamment le malaise viscéral !), un métrage borderline comme le fut en son temps l'aussi controversé Cannibal Holocaust.

05.08.10
Bruno Matéï

http://www.scifi-universe.com/critiques/23711-12-a-serbian-film.htm

7 commentaires:

  1. Ce film est une honte, horrible et répugnant,et dire que cela sort au cinema ou en dvd, et que des gens trouvent que c'est de l'art, il est vrai que nous sommes en 2011, et que l'art neo fasciste snuff-gore est a la mode.

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  2. "et que l'art neo fasciste"

    C'est dingue cette mode de mette le mot fasciste à toutes les sauces et ne même plus, au final, en savoir sa signification. Une telle phrase discrédite immédiatement son auteur : fait de la politique ou de la télévision mon gars, c'est tout ce qui te reste d'abordable intellectuellement.

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  3. Dans 20 ans, il sera reconsidéré comme l'a été Cannibal Holocaust...

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  4. Ce film en dit beaucoup plus long sur le malaise du monde, et plus particulièrement sur les souffrances chaotiques de l'Est, que bien des reportages et articles de presse. Je peux tout à fait comprendre le dégoût, la colère, que cela inspire à la plus grande partie du public. C'est d'ailleurs l'un des buts recherchés par l'auteur. Sa démarche est totalement réactionnaire. Au risque, comme le dit très bien Bruno, d'ajouter quelques vignettes transgressives au rabais à seule fin de provoquer davantage, de solliciter l'insulte et le mépris avec comme disait Baudelaire "le plaisir aristocratique de déplaire". Pourtant, ce n'est effectivement pas en s'achetant une bonne conscience à crédit et en barbouillant le mot "fasciste" sur toutes les surfaces rugueuses et abrasives que l'on aide l'expression à exister. De planquer la poussière sous le tapis ne rend pas le salon plus propre. Il y a et il y aura toujours un type pour venir vous coller le nez dedans. Le mieux disant politiquement correct ne fait qu'amplifier le désir de hurler ses ténèbres, de manière plus sauvage, plus viscérale. Au royaume des scandaleux, "A Serbian Film" n'est ni "La Grande Bouffe", ni "Irréversible", mais il est néanmoins absurdement et tristement édifiant.

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  5. Bonsoir,

    Je n'ai pas encore vu le film mais cela ne va pas tarder. Je tiens d'abord à féliciter Bruno pour la grande qualité de sa critique

    Pour le reste si ce film peut choquer parce qu'il dénonce la pornographie c'est une très bonne chose. Cela reste un film et s'il choque et bien que cela fasse réfléchir les censeurs du cinéma sur les excès de la pornographie actuelle qui elle n'est pas simulée; cette pornographie dans laquelle des jeunes ados d'à peine 18 ans tombent entre les mains d'individus qui les détruiront psychologiquement pour le reste de leur vie.


    Les pouvoirs publics ne font rien sous prétexte que les individus sont majeurs (et que ça rapporte).

    J'exagère ? allez faire un tour sur le net. Le vrai scandale c'est celui là et pas le film chroniqué ici.

    Donc il faut regarder plus loin que le bout de son nez et s'indigner non contre le film qui ne reste qu'une fiction mais contre l'univers sordide de la pornographie extrême actuelle

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  6. Bien vu Bill et un grand merci pour le compliment

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