mardi 22 mars 2011

NAVIGATOR (The Navigator: A Mediaeval Odyssey)

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Cinebisart.com

de Vincent Ward. 1988. Australie/Nouvelle Zélande. 1h31. Avec Bruce Lyons, Chris Haywood, Hamish McFarlane, Marshall Napier, Noel Appleby, Paul Livingston, Sarah Peirse, Mark Wheatley, Tony Herbert, Jessica Cardiff-Smith...

Date de sortie: U.S.A: Décembre 1988.

FILMOGRAPHIE: Vincent Ward est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur néo-zélandais né en 1956 à Greytown (Nouvelle-Zélande).
1984 : Vigil. 1988 : The Navigator: A Mediaeval Odyssey. 1993 : Map of the Human Heart. 1998 : Au-delà de nos rêves. 2005 : River Queen


Une décennie avant la guimauve Au delà de nos rêves (désolé pour les fans), le méconnu Vincent Ward s'était surpassé en 1988 pour mettre en boite un film maudit, chef-d'oeuvre d'aventures fantastiques inexplicablement condamné à l'oubli, voir l'indifférence depuis sa discrète sortie en salles. En 1348, dans un village anglais, la peste noire fait rage et terrorise les habitants. Mais un groupe d'aventuriers mené par un enfant prodige part à la quête d'une cathédrale située à l'autre bout du monde pour y déposer une croix. Pour cause, c'est à travers la vision d'un rêve prémonitoire que le jeune Griffin parvint à convaincre ses camarades que seule une icone religieuse pourrait les protéger de la maladie mortellement contagieuse. Mais en creusant un tunnel, ils se retrouvent projetés quelques siècles plus tard, en 1988, dans l'agglomération urbaine de la Nouvelle-Zélande ! Attention ovni immersif saisissant de réalisme historique, à situer quelque part entre Bandits, bandits de Terry Gillian et le (tristement) célèbre Les Visiteurs de Jean Marie Poiret ! L'oeuvre insolite s'avère d'autant plus captivante et dépaysante qu'elle est endossée par des comédiens méconnus criant de vérité tant et si bien qu'on les croiraient sortis de l'époque médiévale dans lequel ils évoluent ! Comme le sous-titre originel l'indique, cette odyssée médiévale conduite avec entrain par deux frères et quatre acolytes nous transporte au sein d'un périple fantastique à la fois baroque et délirant.


En effet, de manière récurrente, nombre de séquences impromptues vont interférer chez nos héros en herbe, comme celles de traverser prudemment une autoroute à la circulation intensive, s'opposer contre les grues d'un chantier industriel en travaux ou encore affronter à bord d'une barque, et accompagné d'un cheval blanc, un sous-marin s'extirpant brusquement de la mer déchaînée. Sans compter qu'un peu plus tard, l'un de nos héros affrontera un train en marche de manière suicidaire, bien avant qu'un autre n'escalade une gigantesque cathédrale pour y implanter la fameuse croix. Nombre de ces situations saugrenues transposées dans notre environnement contemporain auraient pu sombrer dans le ridicule (remember les pitreries des Visiteurs et de l'insupportable Clavier proférant à tout va ses répliques risibles !) si elles n'étaient pas mis en exergue avec autant de réalisme et de soin formel sous couvert du voyage temporel plus vrai que nature. Une escapade semée d'embûches rationnelles mais rendues extraordinaires sous l'impulsion effarée de nos héros confrontés à l'infrastructure de notre monde civilisé. Tel l'illumination féerique d'une métropole nocturne, l'apparence futuriste de nos véhicules routiers, la trajectoire outre-mesure d'un navire submersible ou celle rectiligne d'un convoi cheminant à grande vitesse. Outre son panel de cocasseries folingues, la force du récit émane aussi de son contexte médiéval illustrant, non sans humour, sensibilité et poésie, une période noire de pandémie via la transmission mortelle de la peste et d'y semer les thèmes de la peur de la maladie et du sens du sacrifice. Car à travers les songes d'un enfant aux pouvoirs divinatoires, Navigator entreprend notamment de nous conter le voyage initiatique d'une cohésion héroïque avec une candeur humaine fragile.


D'une fulgurance formelle alternant le noir et blanc et la couleur, et scandé de choeurs religieux, Navigator est un chef-d'oeuvre de fantaisies héroïques au pouvoir de fascination prégnant. Quand bien même on finit par se surprendre de sa dimension dramatique lors d'un final poignant prônant le sens du sacrifice et le code d'honneur familial. Une odyssée féerique inoubliable à découvrir d'urgence ! 

Note: Le film aurait été couronné de 21 récompenses à travers le monde dont le Meilleur Film à Sitges, au Fantafestival, au New Zealeand Film and TV Awards et à l'Australian Film Institute.

22.03.11
Bruno Matéï

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